Rechercher dans ce blog

13 mai 2018

Analyse : la guerre entre l'Iran et Israël est déjà là

Le Président iranien Hassan Rouhani

Les ambitions expansionnistes du régime des Mollah ne laissent plus de doute

Il n’est plus besoin d’attendre les yeux fixés sur Téhéran une guerre nucléaire et balistique meurtrière, ni de guetter avec plus ou moins de crainte son déclenchement. Parce qu’à seulement quelques dizaines de kilomètres au nord de Tel-Aviv, sur le sol et dans le ciel syrien, la guerre Iran-Israël a déjà commencé.

Les Israéliens l’ont affirmé sans ambages, l'opération de ce jeudi 10 mai était la plus importante de ces derniers mois.
Depuis des années, bien avant le début du conflit syrien, les Israéliens survolent la Syrie et ses bouleversements. D’abord parce qu'il n'y a qu’un cessez-le-feu qui garantisse aujourd’hui le calme précaire à la frontière israélo-syrienne depuis la guerre de 67 et la prise du plateau du Golan.
La centrale nucléaire de Deir ez-Zor bombardée en 2007 est aussi bien un exemple de la dangerosité et de la proximité irano-syrienne que des opérations de surveillance continue des Israéliens.
Puis la montée rapide en puissance de Daesh et la crainte du renversement d'Assad ont imposé à l'échelon militaire de garder les multiples acteurs et leurs territoires aux frontières mouvantes bien à l'œil.
La surveillance israélienne après le recul de Daesh a été renforcée par l'accélération de l'implantation militaire iranienne. Chaque installation, chaque déplacement d'armes et de troupes a été cartographiée et permet depuis des mois d'accumuler des milliers de données, d'évaluer le niveau de menace de tirs iraniens et de cibler les sites les plus dangereux ou susceptibles d'être les plus rapidement utilisés pour une attaque contre Israël.

Cette nuit, plus d'une cinquantaine de cibles ont été touchées en réponse a vingt tirs de missiles contre le territoire israélien. Certaines bases visées devaient être le point de départ de tirs de missiles seulement quelques heures plus tard.
Depuis 72 heures, l'armée israélienne publie des mises en garde et demande la réouverture d'abris anti-missiles et mobilise ses troupes. Une situation d'urgence sans hystérie collective, parce que depuis des années, les Israéliens du nord connaissent les risques d'éclatement d'une nouvelle guerre avec le Liban et la Syrie.
Depuis des années, la population s'est habituée sans joie à ces tirs de mortiers récurrents. Parfois Daesh, parfois les rebelles syriens, parfois le régime d'Assad. Souvent des débordements involontaires, en tout cas pas destiné a ouvrir un conflit contre l'armée israélienne que ni le régime affaibli ni Daesh en pleine déroute ne plaçait en tête de leur priorités.

Mais pour l’Iran, le régime sioniste est et reste une cible prioritaire. Une entité dérangeante à qui Téhéran refuse le nom d'Israël et aux côtés de qui il siège bien malgré lui et dans une curieuse proximité sur les bancs de l'Onu.
Le conflit est enclenché mais son ampleur reste incertaine. Une guerre sur un tierce territoire bien trop proche des frontières israéliennes pour ne pas risquer de déborder si des missiles iraniens touchent des cibles urbaines et civiles dans le nord d'Israël.
Un secteur aussi ou les intérêts de l'Occident sont trop nombreux pour garder le silence, ou faire mine d'indifférence à l'image d'un autre conflit bien plus meurtrier mais suivant le même schéma d'un tierce territoire accusant les coups.
Rappelons que depuis 2014 la guerre fait rage au Yémen entre l'Iran et l'Arabie saoudite.

Quoiqu'il en soit les tensions actuelles renforcent la vision américaine et israélienne de la menace iranienne. Téhéran ne peut pas être observé par le seul spectre du programme nucléaire suspendu par l'accord de 2015 comme le souhaitent les Européens, les Russes et les Chinois.
L'Iran est aujourd’hui impliqué militairement au Yémen, en Irak, en Syrie, et au Liban. Les ambitions expansionnistes du régime des Mollah ne laissent plus de doute.
La véritable question du jour est celle de la convergence des intérêts russes et iraniens. Si à court terme Moscou et Téhéran se sont battus côte à côte pour qu'Assad reste à la tête de la Syrie, une marionnette utile pour installer leur présence. Mais l'Iran prend aujourd’hui, dans sa confrontation avec Israël, le risque d'une déstabilisation régionale à laquelle Poutine n'a guère d'intérêt.

La véritable deadline a été fixée par les Européens à lundi avec une rencontre avec des responsables iraniens sur l'avenir incertain de l'accord controversé.
C’est si les Européens décident de tenir tête à Trump malgré la menace économique que font peser les sanctions renouvelées sur les entreprises européennes - et parmi elles de nombreuses entreprises françaises telles que Airbus, Total ou BNP - que l'entente bien qu'affaiblie a des chances de survivre.
Les Russes et Chinois resteront économiquement et politiquement liés et implantés avec ou sans accord.

Une page blanche s'ouvre avec l'Iran. Un bras de fer s'engage et Donald Trump est friand de cet exercice.

Myriam Danan
I24 News, 10 mai 2018